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17 août 2009 1 17 /08 /août /2009 00:00

6ème conte d'Eawy

Giorgia

Cette histoire a commencé il y a fort longtemps. A cette époque, les mages, les fées et les sorcières existaient encore. Et oui, ces gens-là ont existé. N’en parlez à personne, on risquerait de se moquer de vous. Cependant, il y a de fortes présomptions à ce qu’ils existent toujours mais se cachent de la haine des humains qui se pensent normaux.

Donc, en ce temps-là, le mage Barnabé régnait par la terreur sur les territoires de Rosay et de Bellencombre. Il aimait à faire son malin tous les dimanches matin, en s’installant devant la chapelle Saint Étienne. Tout près de là, il y avait de petites mares. Leurs eaux avaient le pouvoir de guérir des fièvres. Barnabé distribuait l’eau généreusement, avec force d’incantations, il battait l’air par de grands gestes. Dans sa robe noire, il ressemblait à un sinistre corbeau. En échange de toutes ses simagrées, les gens devaient s'acquitter d’une poignée de pièces d’or. Barnabé était un homme intéressé mais pas intéressant. Quand il palpait les pièces d’or, ses yeux pétillaient et ses moustaches s’agitaient de façons frénétiques. D’ailleurs, l’agitation de ses fines moustaches trahissait chez lui une forte émotion. Quand une jolie femme passait près de lui, nous pouvions retrouver automatiquement ce même tic. Est-il besoin de préciser que le mage Barnabé se servait de son influence, et de la réputation des mages, pour séduire les femmes, avec un résultat très relatif et approximatif malgré tout. Quand il réussissait à conquérir une femme, c'était par la peur et la crainte qu'il inspirait à la pauvre créature.

Quand à l’eau des mares de la chapelle Saint Étienne, à l’époque, elle était à peu près potable. Actuellement, si vous avez la fièvre, il vaut mieux appeler un médecin, prendre une aspirine. L’eau est verdâtre, saumâtre, les moustiques y voltigent en surface : un vrai nid à microbe. Quoi que si vous buvez de cette eau, vous êtes presque assuré de ne plus jamais avoir de fièvre… plus jamais.

A l’époque du mage Barnabé, l’eau n’avait pas forcément des pouvoirs, cependant, il était si persuasif que les malades rentraient chez eux en se croyant guéris.

Barnabé avait des goûts douteux. Quand les gens normaux ont un chien ou un chat pour leur tenir compagnie, lui avait un cochon gros, gras, hirsute. Barnabé lui avait jeté un sort pour qu’il obéisse comme un chien. Et cela marchait… Ce cochon ne répondait qu'à la voix de son maître. Quand il hurlait « Brutus », le cochon rappliquait, dégoulinant de bave, les poils en sueur. Pour qui voyait le spectacle, ce n'était guère ragoûtant.

Barnabé était conseillé, secondé par la fée Maléfic. En fait Maléfic se servait de lui pour acquérir du pouvoir. Tout le monde imagine toujours les fées graciles, souples, jolies, douces, avec de petites ailes, volant rapidement d’un endroit à un autre. Pour la fée Maléfic, ce n’était pas le cas. Côté gracieux, c’était raté. Elle était en surpoids évident. Il y avait longtemps qu’elle n’avait plus décollé du sol. Elle marchait lourdement. D’ailleurs, ses ailes s’étaient flétries. Si son sourire était impeccable, il n’en demeure pas moins qu’il était carnassier. Elle aussi manipulait son monde afin de satisfaire son égo. Elle avait soif de puissance, de pouvoir.

A ce propos, depuis quelques mois, elle essayait de rallier à sa cause les mages et les sorcières des communes du canton de Bellencombre. Seuls les mages noirs entraient dans son jeu, ainsi que les sorcières les plus méchantes, bêtes et stupides. Et Dieu sait qu'il y en avait à cette époque là.

Giorgia, elle, était une femme on ne peut plus normale, équilibrée, libre de ses choix. Elle laissait agir son cœur. Elle était la créatrice d’un endroit où tout un chacun pouvait trouver aide et soutien. Quand une personne avait besoin d'aide, Giorgia se démenait pour l'aider. Elle parlait toujours avec douceur, affichant un sourire rassurant. Elle proposait toujours une boisson chaude, afin de d'offrir un instant chaleureux, réconfortant,convivial.

Depuis que Giorgia s'était installée aux abords de Rosay, à la lisière de la forêt, elle avait fait beaucoup de bien autour d'elle. Elle avait réussi à rallier un gentilhomme à la cause des enfants. Côme leur apportait des activités nouvelles et en plus il épaulait les familles les plus démunies. Tous ces éléments mis bout à bout mirent Barnabé en furie. Il voulut déclencher une dispute, devant l'église de Rosay mais Giorgia restait calme. Au moment où elle voulut brandir la médaille de Saint Benoît, le saint de l'église, celui qui combat les forces du mal, la fée Maléfic lança un sort par derrière, à l'encontre de Giorgia. Selon son habitude, cette perverse avait agit en traître.

Quand Maléfic éructait, c'était de la méchanceté et quand elle flatulait, c'était de la ruse. Elle transpirait la haine. Maléfic avait transformé Giorgia en Lamantin, en femme poisson. Le mage Barnabé la transporta dans une des mares de la chapelle Saint Étienne. Malefic jeta un sort à la forêt. Les arbres et les fougères se mirent à proliférer tels une jungle afin de cacher l'endroit où nageait désormais Giorgia. La disparition de Giorgia avait troublé la population Elle avait été si bonne avec tous, le choc était immense.

L'aide du mage Barnabé fut demandée. Évidement il éludait le problème, parlait d'une fugue probable de la grande dame. Côme sortait de ses gongs. Maléfic le calma en le transformant en bébé loup. Elle le chassa à coups de pied dans la forêt. Côme essayait de se frayer un chemin dans la forêt d'Eawy. Mais les lieux étaient méconnaissables. Comment allait-il retrouver Giorgia ? Allait-elle paniquer à son apparence de loup? Les interrogations submergeaient Côme autant que l'inquiétude. Sa poitrine se serrait, sa respiration était haletante. Retrouver Giorgia était une véritable gageure dans cette végétation folle.

Au même moment, un vent de révolte souffla sur le canton de Bellencombre. Le mage Barnabé et la fée Maléfique avaient été capturés. Maléfic se défendait en distribuant les sorts. L'un fut transformé en cochon, l'autre en autruche, le maître d'école arborait des oreilles d'âne…

Maléfic fut ligotée au plus vite, ainsi elle ne pouvait plus faire aucun mal. Le mage Barnabé avait le regard vide. Sans Maléfic, il montrait ce qu'il était : un imbécile, couard, complètement abruti.

Durant ce temps, bébé loup Côme usait ses pattes sur les sentiers envahis par la végétation de la forêt d'Eawy. Il avait vraiment très soif et comme il arrivait aux abord de la chapelle saint Étienne, ce fut tout naturellement qu'il s'y désaltéra. C'est à ce moment qu'il vit une masse sombre dans l'eau, deux grands yeux l'observaient. Côme jappa de terreur. Giorgia fit claquer sa queue de lamantin. Ce geste le ramena à la raison. Elle avait reconnu le regard de Côme, tout comme Côme venait de reconnaître le regard de Giorgia.

Au village, les événements se précipitaient. Les villageois allaient décider du sort de Maléfic. Et comme elle ne faisait plus peur à personne, il n'y eu aucune retenue dans le jugement. Sa mise à mort fut entérinée. Un bûcher fut installé entre Bellencombre et Rosay. Elle fut saisie et attachée. Le bûcher fut allumé.

Dès l'instant où elle expira, tous les mauvais sorts qu'elle avait jeté durant sa vie furent annulés. L'instituteur retrouva ses oreilles à son plus grand soulagement La forêt se dépouilla de toutes ses mauvaises herbes et son trop plein de végétation. La chapelle Saint Étienne put enfin réapparaître au soleil. Quand à Giorgia et Côme, ils retrouvèrent enfin leurs véritables apparences. Ils redescendirent ensemble vers Rosay. L'odeur de chair brûlée de Maléfic agaçait les narines.

La foule était en liesse à l'arrivée de Giorgia. William, le second de Giorgia lui résuma les derniers événements. Barnabé fut contrait à présenter des excuses publiques à Giorgia. Il fut ensuite bannit de la forêt d'Eawy et de ses alentours, lui et son ignoble cochon Brutus.

Par la suite, Brutus fut capturé par un artisan brossier. Il profita d'un sommeil aviné de Barnabé pour lui voler son cochon poilu. Mais me direz-vous que faire d’une bestiole aussi bête et méchante, pourquoi le dérober ? Le brossier lui retira ses soies (nom des poils du cochon), et en fit des brosses à cheveux pour les femmes riches. Une fois son travail terminé, le brossier le ramena auprès de Barnabé qui continuait de cuver. A son réveil, il ne reconnut pas Brutus. Pensant qu'on lui avait échangé son cochon contre ce tas de gras rosâtre, il se mit à le battre à mort.

Ainsi, Barnabé finit sa vie seul, reclus à mille lieux de Rosay et de Bellencombre. Il ruminait sa rancœur et sa rage.

La population avait retrouvé une vraie joie de vivre, la sérénité. Quand à Maléfic, ce fut à cause d'elle s'il y eut une chasse aux sorcières en France, afin de les faire disparaître du pays.

Giorgia continua a faire le bonheur de la population et continua à aider Côme à offrir des jeux instructifs et divertissants aux enfants des communes de Rosay et Bellencombre.

Vous les enfants et vous, ceux qui avez gardé votre âme d'enfant, n'oubliez jamais que faire ce qui est bien, est plus gratifiant dans une vie que d'être méchant. On se souvient toujours des personnes gentilles, les méchants, on les oublie très vite. Le véritable amour, le plus beau, est celui qui est désintéressé, à l’image de celui que Giorgia offrit aux gens. Si vous aussi, vous voulez qu’on vous aime autant que Giorgia a été aimée durant sa vie, faites le bien autour de vous, aidez les autres, pas seulement les gens de votre famille. Ainsi, peu importe la longueur des jours de votre vie, on ne vous oubliera pas non plus.

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3 juin 2009 3 03 /06 /juin /2009 00:00

Les contes d'Eawy :

La Grande Odalisque aux Grandes-Ventes



Cette histoire aurait pu se dérouler dans n’importe quel village. D’ailleurs, le cirque Ravanesky allait partout, spécialement dans tout le Nord Ouest de la France.


Le directeur était quelqu’un de très pointu dans la direction de son cirque. Il était exigent, autoritaire, parfois dur. Malgré cette dureté, il réussissait tout ce qu’il voulait. Tous les artistes s’accordaient pour dire qu’il dirigeait le cirque d’une main de maître. Le cirque Ravanesky était le plus divertissant de la Haute Normandie. Le programme était varié et d’une grande qualité.


Ravanesky était terrible avec ses artistes. Plus il les aimait, plus il était exigeant, voir tyrannique.


Il partageait sa caravane avec une funambule, danseuse de corde, Eva. Elle travaillait dur pour être à la hauteur des exigences du directeur. Si elle partageait sa vie, elle n’en dégageait aucun avantage, bien au contraire. Chaque soir, elle était épuisée par les répétitions et les spectacles. Chacun de ses muscles étaient douloureux lorsqu’elle tombait morte de fatigue dans son lit.


Ravanesky allait d’exigences en exigences, chacune de plus en plus difficiles à réaliser. Entre sa vie d’artiste et sa vie de femme, Eva sacrifiait tout ce qui lui faisait plaisir. Son état d’épuisement devenait dramatique. Ravanesky ne voyait rien, il était totalement pris par son cirque.


Eva trouvait un peu de réconfort auprès des animaux de la ménagerie. Elle vouait une véritable amitié aux éléphants et aux singes. D’ailleurs, ils lui rendaient bien.


Gaspard, le plus vieil éléphant, lui avait sauvé la vie, dans le passé, en la rattrapant in extremis alors que Ravanesky lui avait demandé d’exécuter un saut périlleux arrière dans un exercice de funambulisme.


Eva se sentait bien avec les animaux, elle aimait cette odeur de fauve. Elle n’appréciait pas l’odeur aseptisée des gens bien pensant. D’ailleurs, elle s’en méfiait.


Ravanesky aimait-il Eva ? Nul ne saurait l’affirmer. Cependant, dans l’alcôve de la caravane, il lui susurrait des mots d’amour, disait l’adorer.

Mais était-ce l’aimer que de lui imposer des exercices de plus en plus difficiles et périlleux.


Eva ne se révoltait jamais. Elle subissait. Lui, il passait son temps libre dans les bras de maîtresses rencontrées à l’issue des spectacles. Etrange façon d’aimer sa femme ....


Sur le mur de la chambre de la caravane, Ravanesky avait mis une représentation du tableau d’Ingres : La Grande Odalisque. Il avait acheté ce tableau à un peintre miteux à Paris. Chaque soir et chaque matin, Ravanesky regardait La Grande Odalisque avec concupiscence. Son teint bi affolait ses sens.


Elle était le symbole de ce qu’il ne posséderait jamais. Il savait pertinemment qu’il ne séduirait jamais cette femme de papier, mais il ne pouvait s’empêcher de fantasmer.

Rapidement, Eva ne dit plus rien : les colère de Ravanesky étaient suffisamment terribles pour qu’elle n’ait pas envie de les déclencher. Elle savait pertinemment que si elle parlait du tableau, elle devrait subir son courroux durant des heures.


Ainsi était la vie du cirque Ravanesky…


Les animaux étaient de plus en plus proches d’Eva. Ils étaient indispensables à son existence et l’aidaient à tenir le coup.


Le vieux Gaspard était le confident idéal. Jour après jour, elle épanchait son cœur auprès de l’éléphant. Gaspard lui répondait avec ses bons yeux. Il posait sa trompe sur son épaule, tandis que la troupe des singes venait l’entourer, la câliner. Elle ressortait toujours raffermie après ces moments là. Elle était intimement persuadée que les animaux sont moins bêtes que les humains.


Depuis quelques jours, le cirque Ravanesky avait posé bagages aux Grandes Ventes. Ils avaient eu l’autorisation de la mairie pour s’installer au hameau de la Grande Rue. Nous étions à la fin du mois d’août, et le dimanche suivant, la fête de la moisson allait battre son plein comme tous les ans. Le cirque était l’opportunité afin de compléter les animations et faire de la fête un grand succès.


La fête de la moisson des Grandes Ventes drainait beaucoup de monde du canton de Bellencombre et des alentours.


Le cirque allait offrir, en plus de la traditionnelle kermesse, un spectacle pour les petits et les grands.


Depuis le lundi, Eva répétait son numéro sous la direction de Ravanesky. Il hurlait, tempêtait. Elle n’était jamais à la hauteur.
_ « Je te demande de faire trois salto arrière sur cette satanée corde, et tu rechignes, tu es vraiment trop nulle ! Tu as trop grossi, tu t’empâtes, tu as le cul lourd,…

Les « compliments » pleuvaient, …

Eva ne voyait plus la corde. A plus de 3 mètres de haut, elle risquait à tout moment de se rompre le cou.

Ravanesky continuait sa litanie : « - Tu es une incapable, tu ne sers à rien, … »


En pleurs, Eva rejoignit le sol. Elle se planta devant Ravanesky : »- J’en ai assez. Je regrette de ne pas être La Grande Odalisque. Elle, tu la regardes avec amour chaque jour que Dieu fait. Moi, je n’ai que dénigrement, haine et mépris. Je rêve d’être les yeux de ce tableau afin que tu me regardes avec amour et passion. Tu ne m’aime pas Je ne suis pour toi qu’un moyen, un numéro pour te faire du fric. »


Ravanesky était sidéré. Eva la douce Eva, lui tenait tête, elle qui ne l’avait jamais fait … Il ne comprenait pas. Elle sortit du chapiteau sans se retourner en lui criant : « - Je suis enceinte de trois mois.


Elle courut jusqu’à la grand route, déterminée à faire du stop et partir loin, très loin. Cette route est sur l’axe Dieppe – Paris. Elle est toujours très empruntée pour les camions qui roulent à un rythme endiablé.


Eva était perturbée, elle tremblait de tous ses membres. Elle ne voyait plus où elle mettait ses pieds, ses yeux étaient noyés de larmes. Elle trébucha et se déporta sur la route au moment où un camion passait. Il la bouscula, elle tomba. Dans sa chute, sa Tête heurta le trottoir.


La valse des pompiers commença, le SAMU, …


Elle fut transportée à l’hôpital de Dieppe. Ravanesky fut averti. Il était anéantit. Eva était dans un état critique. Elle était dans un coma profond. Dans l’accident, elle avait perdu son enfant. Ravanesky était fou de douleur.


Le cirque au grand complet avait été déplacé à Dieppe afin d’être tout près d’Eva.


Gaspard, le mâle dominant des éléphants força le passage du chapiteau, à la fin des répétitions. Les autres le suivirent. Les singes les imitèrent et montèrent à dos d’éléphant.


Ils s’arrêtèrent devant l’hôpital. Ils attendaient Eva. Ils restèrent ainsi plusieurs jours et plusieurs nuits prostrés dans la froidure des premiers jours de septembre. Ils se lassèrent et rejoignirent le cirque.


Le temps passait,


Eva était toujours dans le coma. Cependant, son esprit était toujours hyper actif. Elle se sentait légère. Elle voguait là où elle le désirait. Elle vint se fixer dans le regard de La Belle Odalisque. Jour après jour, elle regardait Ravanesky se réveiller et s’endormir. Mais lui, il ne regardait plus le tableau de la même façon depuis la tragédie d’Eva.


Quand son regard se posait sur La Belle Odalisque, il était chargé de colère et de haine. Eva souffrait de ce regard, même si elle savait qu’il ne lui était pas destiné.


Déjà un an qu’elle avait eu son accident. Ce matin là, Igor Ravanesky se réveilla avec un regard encore plus noir que d’habitude. Il se leva et décrocha le tableau. Il le claqua au sol et le piétina.


Eva regagna son corps. Elle ouvrit les yeux, se tourna vers la fenêtre et vit le soleil : elle revenait de loin.


Ravanesky fut désormais d’une grande douceur. Il l’aima et la chérit tel qu’il aurait toujours dû le faire. Il ne voulait plus qu’elle monte sur une corde.


Souhaitant continuer à travailler, elle prit la direction d’un numéro de domptage avec les éléphants et les singes. Le cirque Ravanesky rencontrait un vif succès.


Ravanesky et Eva étaient chaque jour de plus en plus heureux et amoureux l’un de l’autre.


Pour leurs vieux jours, ils s’installèrent aux Grandes ventes. Leur maison était l’attraction des enfants du village. Ravanesky et sa femme avaient gardé les éléphants afin de leur offrir une retraite méritée auprès d’eux.


Si vous passez par les Grandes Ventes, pensez à l’histoire du cirque Ravanesky et peut être apercevrez-vous un éléphant, un des descendants du vieux Gaspard.


Et n’oubliez jamais, que les histoires d’amour peuvent finir bien à condition d’y mettre chacun du sien et de la bonne volonté.

 

 

 

Bénédicte Mouchard




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19 mars 2008 3 19 /03 /mars /2008 00:00

Les contes d'Eawy

Adèle, l’hirondelle du Londel

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Adèle est née à Bracquetuit. Ses parents avaient fait leur nid au faîte d’un arbre, dans le creux d’une branche ancestrale, au pied du Londel. Le Londel est un ruisseau bien souvent à sec en été.

 

A quelques mètres là, au sommet d’un chêne, vivait un couple de buse. Chez eux aussi, un bébé venait d’éclore : Erasmus.

 

Si Adèle grandissait vite en sagesse et joie de vivre, Erasmus était paresseux et morose. Si Adèle commençait à virevolter autour de son arbre en faisant des piqués vers le Londel pour gober les moustiqueundefineds, Erasmus flemmait dans le nid familial.

 

Erasmus se laissait gaver à longueur de journée. Sa mère lui amenait des vers, des morceaux de charogne. Il n’avait jamais mis une aile dehors, malgré qu’il ait déjà toutes ses plumes.

 

Adèle devenait de plus en plus habile en matière de vol plané. Elle avait tout compris de la technique du looping, la vitesse,… Elle faisait des descentes stupéfiantes au risque de se casser le bec, pour mieux remonter vers la cime des arbres.

 

Elle était gourmande et raffolait des petites baies des arbres, celles du sureau ou encore du cassis qu’elle chipait dans le jardin du maire. Cependant, ses jeunes entrailles avaient dû mal à s’habituer  à ce régime. A voltiger comme une folle, elle avait bien souvent des problèmes de ventre et de fortes coliques provoquaient des diarrhées en vol.

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Un matin où Adèle s’était trop gavée de sureau, elle eut de violente douleur dans le bas ventre alors qu’elle remontait en piqué devant le chêne des parents d’Erasmus. Elle rétablit la situation, fit un vol presque stationnaire au dessus du nid des buses. Et ce qui devait arriver arriva : elle fienta juste au dessus de la tête d’Erasmus qui se trouva tout souillé.

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De colère, il se leva. Lui qui n’avait  jamais pris son envol, il sauta dans le vide. Il battit violement des ailes. Voler c’est bien, mais savoir se diriger est primordial. Si Erasmus vola sur quelques mètres, il se fracassa sur le premier arbre venu. Il était fou de colère, de rage. Ces yeux étincelaient. Ce jour-là, il se promit de se venger de cette sale petite importune.

 

Il régla le plus urgent : savoir se diriger en volant. Sa mère mit plus d’un mois à lui apprendre quelques bases : virer à gauche, à droite, garder son cap.

Ensuite, il s’attaqua à la vitesse. Il lui fallait comprendre comment utiliser le vent et ses courants pour utiliser le moins d’énergie  possible afin que la vitesse devienne naturelle pour ce paresseux.undefined

Entre temps, Adèle avait pris la route du sud pour un bon semestre. Elle profitait du soleil africain avec sa mère. Son papa n’avait pas achevé le voyage ; Une très forte bourrasque l’avait disloqué sur les cotes méditerranéennes.

 

La mère d’adèle s’endormit, épuisée par le voyage et de chagrin, dans ce nid où elle avait tant aimé son amoureux. Elle s’endormit et ne se réveilla point.

 

Adèle fit sa vie. Elle entreprit de construire son propre nid. Elle entreprit de le faire au creux du toit d’une case. Elle y mit le temps mais elle fabriqua un endroit impeccable et confortable.

 

Pendant ce temps, Erasmus avait pris son indépundefinedendance. Toujours un peu flemmard, il avait profité d’une fenêtre cassée au dernier étage de la mairie de Bracquetuit afin de s’installer dans les combles. Il avait trouvé de la paille et même un vieux matelas. Il menait une vraie vie de pacha.

 

Depuis qu’il savait voler avec brio, il faisait régner la terreur sur le village et les alentours. Les petits oiseaux tel que les mésanges, les rouges gorges qui ne migrent pas, en avaient grande crainte. Combien d’entre eux avait-il décimé ? Nul ne saura jamais le dire.

 

Dans son esprit de buse dégénérée, Erasmus ne pensait qu’à une chose : se venger. Il attendait le retour d’Adèle avec une impatience non dissimulée.

 

L’opération vengeance avait déjà commencé. Erasmus avait mis en pièce le nid d’été d’Adèle et ses parents. Il faut dire que ce nid était véritablement difficile à atteindre. Coincé à l’équerre du tronc et d’une branche, malgré la solidité de la construction, Erasmus mit toute son énergie, et sa rage afin de détruire le nid. A coups de bec et de griffes, il atomisa le nid d’été d’Adèle et ses parents.

 

Jamais paresseux n’avait autant travaillé, il mit trois jours à s’en remettre. Mais il avait pris un plaisir infini dans son œuvre de destruction. Durant trois jours, entre deux sommeils, il imaginait le désarroi de l’hirondelle. Il s’en amusait, ricanait et rirait fort.

 

Il est vrai que le retour d’adèle au printemps fut sous le signe de grands bouleversements. Erasmus l’observait de son œil perçant. Un rictus de haine se lisait sur son visage tandis qu’Adèle virevoltait de droite et de gauche marquant ainsi son désarroi à la disparition du nid familial.

Erasmus se dressa, poussa un cri suraigu et fonça droit sur la frêle hirondelle. Adèle n’eut pas d’autres solutions que de fuir. Pour échapper à son poursuivant, elle slalomait entre les arbres. Il faut dire qu’elle était avantagée par sa petite taille.

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Eramus quand à lui avait acquis suffisamment de puissance pour voler aussi vite qu’elle. Cependant, il restait lourd dans ses déplacements. Malgré tout, Adèle se trouva acculée devant une sorte de pompe près du Londel. Erasmus, les yeux injectés de sang avançait vers elle avec un rictus mauvais.

 

Adèle transpirait à grosse goutte. Il faut dire qu’elle se souvenait maintenant parfaitement de lui avoir fienté sur la tête.

 

Elle regardait de ci delà s’il n’y avait pas moyen de s’échapper. Mais rien, elle n’avait aucune chance de salut.

Un petit sifflement se fit entendre juste au dessus de sa tête. Elle était pile net juste au dessous de la bouche d’écoulement de l’eau. C’était véritablement une bouche en forme de gueule de lion. Adèle n’hésita pas à s’introduire dedans. L’endroit était lumineux, phosphorescent. La curiosité était trop forte, adèle continuait à avancer dans le dédale de tuyaux et arrivait enfin auprès de la rive d’un mini lac souterrain. Une floppée de moineaux l’accueilli par des piaillements assourdissants.undefined

 

Une vieille taupe répondant au nom de Symphorien l’accueillit  avec un discours grandiloquent. Somme toute, beaucoup de mots pour ne pas dire grand chose mis à par qu’il était content de la voir rejoindre les autres oiseaux de Bracquetuit.

Apparemment, depuis 6 mois qu’Erasmus savait voler, il avait mis une telle terreur dans le ciel du village que Symphorien, compatissant, avait agrandit ses galeries et construit une grande pièce commune afin que les oiseaux puisundefinedsent jouir d’un certain confort près de la nappe phréatique. Depuis 6 mois, il vivait avec les rouges-gorges, les mésanges, les hirondelles nouvellement arrivées.

 

Les hirondelles avaient du mal à s’habituer à l’enfermement. Elles qui apprécient tant les grands espaces avaient le plumage qui avait blanchit sous l’effet du stress. Dès qu’un oiseau essayait de sortir le bec dehors, Erasmus fonçait sur lui.

 

La meilleure sauvegarde était encore de rester enfermé, protégé dans les entrailles de la terre. Au lieu de gratter la surface du sol, les moineaux le faisaient sur les parois afin de trouver des vers à manger.

Symphorien et les autres taupes du village creusaient des galeries afin de récupérer les graines et les racines.

 

Cette année là, les récoltes furent désastreuses à Bracquetuit.

 

La frêle Adèle se sentait responsable de la situation. Elle s’en confia à Symphorien qui eu des propos consolateurs : «  de toute façon, Erasmus est une boule de haine, on ne peut pas s’attendre à mieux de lui. Et si tu ne lui avait pas crotté » sur la perruque, il s’en serait pris à quelqu’un d’autre, »

 

Adèle avait pris la décision de se débarrasser de son ennemi L’église Saint Marguerite de la commune était ouverte au beau temps aux regards des passants, par une grille. Le grillage en fer forgé pouvait laisser passer un oiseau de petite taille mais guère plus.

 

Un beau matin, Adèle respira bien fort et prit son vol. Le ciel de Bracquetuit était merveilleux.

 

L’œil aiguisé d’Erasmus l’avait repéré. Il se mit à la pourchasser. Adèle pris la direction de l’église et se faufila entre les barreaux de l’entrée. Si Adèle était passée, Erasmus, lui, s’était claqué  le bec tout contre

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L’instituteur de la commune le ramassa et le soigna. Le bec d’Erasmus était devenu tout tordu, comme celui des perroquets. Désormais, il savait parler. L’instituteur l’avait gardé dans la classe de dernière année de primaire. Mais les enfants lui apprenaient trop de gros mots et il répétait bêtement. A force des coup de règles du maître, il perdit cette vilaine habitude Par contre, il répétait sans se lasser l (histoire des papous de Papouasie : Chez les papous y'a des papous papa et des papous pas papa. Mais chez les papous il y a aussi des poux, donc chez les papous y'a des papous papa à poux, des papous papa pas à poux, des papous pas papa à poux et des papous pas papa pas à poux. Chez les poux il y a des poux papa et des poux pas papa. Alors chez les papous, y'a-t'il des papous papa à poux papa, des papous papa à poux pas papa, des papous papa pas à poux papa, des papous papa pas à poux pas papa, des papous pas papa à poux papa, des papous pas papa à poux pas papa, des papous pas papa pas à poux papa et des papous pas papa pas à poux pas papa ?

 

Voyant qu’Erasmus ne pourrait plus jamais nuire à personne, l’instituteur le plaça dans l’école des maternelles. Les gamins raffolaient de l’histoire des papous de Papouasie.

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Pendant ce temps, Adèle et les autres oiseaux de Bracquetuit avaient repris possession du ciel et profitaient d’une vie bien agréable.

 
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Texte : Bénédicte Mouchard

Illustrations : Agnès Adidi

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19 mars 2008 3 19 /03 /mars /2008 00:00

Les Contes de la forêt d’Eawy : Adèle l’hirondelle du Londel

 

Un nouveau conte

 

Adèle l’hirondelle du Londel fait son apparition aujourd’hui dans les contes de lundefineda forêt d’Eawy.

 

Le texte est toujours de Bénédicte Mouchard et les illustrations d’Agnès Adidi.

 

Agnès est à remercier pour ses dessins, rendant le texte plus vivant et plus amusant. La collaboration avec Agnès est un pur plaisir.

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24 février 2008 7 24 /02 /février /2008 00:00

Les contes de la forêt d’Eawy : Firmin

 

Firmin illustré par Agnès Adidi

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Il existe déjà plusieurs contes d’Eawy, dont Firmin le petit lapin de Saint Hellier. Agnès Adidi a bien voulu collaborer avec moi pour illustrer ce conte. Je me suis bidonnée en voyant ce qu’elle avait imaginé et mis sur le papier.

 

Je suis très heureuse de cette collaboration avec Agnès et j’espère que cela se renouvellera.

 

Pour retrouver l’histoire de Firmin et les illustrations d’Agnès Adidi, il suffit d’aller dans la rubrique « les contes de la forêt d’Eawy ».

 

Grand merci à Agnès Adidi de ce beau cadeau : m’avoir suivie dans mes délires imaginatifs.

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5 juin 2007 2 05 /06 /juin /2007 01:59

Les contes d’Eawy

 

Firmin, le lapin de Saint-Hellier

 

 

  undefinedFirmin était un lapin de clapier tout ce qu’il y a de plus banal. Il n’avait rien de particulier. Il n’était pas bien gros, il avait le poil rêche, et franchement pour tout dire, il n’était pas beau, il était désespérément ordinaire. Ses défauts faisaient de lui un petit être abject. Il était hypocrite, voleur, menteur et égoïste. Son sport favori était de gâcher la vie des autres animaux et aussi des gens. Firmin était futé, il faisait toujours ses coups en dessous. Jusque-là, jamais aucun habitant de Saint-Hellier avait pensé à le soupçonner.

Firmin logeait dans un clapier non loin de la bibliothèque. Son jeu préféré était de voler la nourriture de ses comparses, boire l’eau de tous au risque de s’en rendre malade. Mais non content de se comporter comme un glouton, il ne se privait pas de déféquer dans la gamelle commune et de remplacer l’eau qu’il avait engloutie par son urine. Sa farce préférée était de pisser dans les piscines privées de la commune.

 

 

Il n’y avait pas une semaine où il ne se comportait pas salement. Les autres lapins le craignaient. Même si Firmin était gourmand, il restait maigrichon. Sa méchanceté brûlait ses calories. En plus, quand la fermière venait pour tuer un lapin afin de le cuisiner sauce chasseur, Firmin faisait en sorte de toujours pousser le plus gros du clapier, vers les mains assassines.

 

Nous ne pouvons pas douter que Firmin soit malin et très futé. D’ailleurs, il savait ouvrir le verrou du clapier. Le soir, il allait voler dans les jardins, de-ci delà dans Saint Hellier et ses environs. Jamais il ne se faisait prendre. Il faut dire qu’il prenait beaucoup de précautions : il sortait la nuit et rentrait avant l’aube.

 

Tout le restant de la journée, il paressait dans son clapier. Son calme apparent faisait que la fermière ne se méfiait pas de lui. Et pour tout dire, elle avait une affection pour ce petit lapin malingre. Les autres lapins se tenaient à carreau, surtout depuis que Firmin s’était alliundefinedé à deux bandits pour raquetter dans les clapiers et les jardins.

 

L’un des deux coquins était Edmond. Il venait du hameau de la Fresnaye. Il était lourd, énorme, comme tous les lapins de sa race : les géants des Flandres. Au Beau Soleil, Edmond et Firmin s’étaient liés d’amitié avec Robert. Ce fameux Robert n’était pas bien malin, pour tout dire, il était franchement crétin. Cependant, il était très intéresundefinedsant sur un point bien précis : il était doué d’une très grande force. Avec sa tête, il pouvait enfoncer les portes des clapiers, des poulaillers, même celles des étables et des écuries. Robert était un lapin de la race des lapins béliers.

 

Firmin, Edmond et Robert écumaient Saint-Hellier presque toutes les nuits. En s’alliant tous les trois, ils se sentaient très forts, quasiment invincibles.  Si Firmin était rusé, intelligent et méchant, Robert et Edmond lui servaient pour leurs forces. Firmin avait toujours regretté de ne pas être grand, beau et fort. Par ses malversations, il faisait payer à tout le monde ce que la nature ne lui avait pas donné. Il savait que c’était puéril, mais il avait un tel besoin d’être reconnu et craint.

 

Certains soirs, ils se retrouvaient vers minuit près de l’église. De là, ils faisaient méthodiquement la tournée du pays. Tout un été leur avait suffit pour mettre à sac les jardins du pays, de la Fresnaye à Orival. Les habitants étaient furieux, ils se demandaient qui avait bien pu piller leurs jardins.

 

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Firmin, Edmond et Robert avaient cependant laissé des traces. Mais les Saint Héllériens mettaient celles-ci sur le compte des lapins de bois. Ils étaient à mille lieux de penser qu’il s’agissait de lapins de clapier.

 

La renommée de Firmin et ses sbires avaient dépassé la frontière de Saint Hellier. Le bruit de ces pillages s’était propagé comme une traînée de poudre de Bosc-le-Hard aux Grandes-Ventes.

 

Les jeunes lapins trouvaient Firmin merveilleux. Il était le bandit au grand cœur, le super héros, alors qu’en réalité, il avait le cœur sec et ne pensait qu’à lui-même. La jeunundefinedesse idéalise toujours les canailles.

 

Aux Innocents, un hameau de la Crique vivait la vieille Léonie. Léonie était une vieille vache respectée de tout le canton. Elle incarnait la sagesse animale sur tout le secteur de Bellencombre et ses environs. Un soir, n’en pouvant plus de jalousie de la notoriété fallacieuse de Fundefinedirmin, elle prit la route de Saint Hellier. Elle arriva là-bas vers 1 h du matin. Elle s’abreuva dans la Varenne. Elle soufflait comme un bœuf. Dès qu’elle eu bien récupéré, elle ouvrit grand ses yeux et ses oreilles.

 

Elle eut beaucoup de chance. A 1 km de là, dans une ferme sur les hauteurs du Beau Soleil, elle repéra une agitation suspecte. Notre « bande à Bonnot » des clapiers allait sortir quand la vieille Léonie leur fonça dans les poils. Ils étaient totalement pétrifiés de stupeur. Puis il fallut lui faire face bravement. Ils lui ricanèrent à la face. Ils n’auraient pas dû…

 

Léonie distribua des coups de queue, des coups de tête, des coups de cornes. Elle était folle de colère. Elle continua à envoyer des coups de sabots jusqu’à en être épuisée.

 

Quand Edmond et  Robert rentrèrent chez eux, ils étaient dans un tel état que leurs propriétaires décidèrent d’en mettre un en casserole et l’autre à la moutarde.undefined

 

Firmin quand à lui, il avait reçu un tel coup de sabot dans les fesses que sa petite queue avait été déplacée. Désormais, elle était située entre ses deux épaules, à la base du cou. La fermière le vendit à un cirque pour qu’il fasse rire les enfants. Jamais plus il ne trafiqua la porte de son clapier pour sortir, il avait trop honte de son apparence.

 

La vieille Léonie restait la sagesse animale du canton de Bellencombre et elle avait encore plus de notoriété qu’avant.

 

Quand à Saint Hellier, le village avait enfin retrouvé sa sérénité.


Texte de Bénédicte Mouchard
Illustrations d'Agnès Adidi

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10 janvier 2007 3 10 /01 /janvier /2007 02:50

Les contes de la forêt d'Eawy : Ovide et Hyménée

 

Cette histoire a commencé juste après la seconde guerre mondiale, en plein milieu du vingtième siècle. La Normandie pansait ses plaies, et essayait de se reconstruire.  Mais la campagne restait calme, elle avait été beaucoup moins touchée par les bombardements que les grandes villes telles que Rouen et Le Havre.

 


A Saint Martin sous Bellencombre, petit hameau situé entre Saint Hellier, et Bellencombre vivait un gros exploitant agricole. Il avait un cheptel colossal à la sortie de la guerre. Il faut dire qu’il avait acquis avant la guerre un taureau limousin, très robuste, à la robe brune roussâtre. Ovide, le taureau, avait amplement participé à la réussite de mon propriétaire. Ses descendants étaient légions. 
 


Maître Henri était un homme pragmatique. Il voyait toujours son intérêt. Il avait trouvé la race de vache parfaite donnant beaucoup de lait, une bonne viande et demandant peu de soin. Le croisement avec Ovide le limousin donnait des veaux et des génisses aux qualités puissantes et robustes.


Ovide vivait d’un côté de la Varenne, tandis que les vaches paissaient de l’autre côté. Seule une passerelle les séparait, elle enjambait la rivière. Si Ovide était de race limousine, les vaches étaient toutes de race normande. Elles avaient des hanches volumineuses, la mamelle replète. Le fermier trouvait qu’elles étaient la race bovine la plus facile à élever. Elles faisaient leurs petits aisément, sans l’aide de Maître Henri ou d’un vétérinaire. Elles donnaient beaucoup de lait et de très bonne qualité, de plus leur chair était goûteuse avec juste ce qu’il faut de gras, ni trop, ni trop peu.
 

  Ovide était trapu, massif, puissant. Ses cornes étaient épaisses, dangereusement pointues. Les poils au sommet de sa tête étaient légèrement frisés. Il était magnifique et faisait la fierté de son éleveur. Cependant, Ovide commençait à prendre de l’âge et ses forces déclinaient. Maître Henri, son propriétaire ne voulait plus le garder. Il devenait inutile, il était une bouche de trop à nourrir. En plus, Maître Henri était tombé sous le charme d’un taureau normand fringuant et fougueux qu’il avait vu à quelques kilomètres de là.

 
Avant la seconde guerre mondiale, Maître Henri avait fait son service militaire en Aveyron. Son meilleur ami habitait le Nord du département, dans un petit village nommé Anfrusque. L’Nicolas élevait des vaches d’Aubrac, des salers à la viande si fine, si délicate. Ces vaches étaient résistantes au froid et à la sécheresse. Maître Henri fut tenté d’essayer d’élever des salers en Normandie et L’Nicolas des Normandes en Aveyron. Tous les deux étaient avides, à l’affut du gain. Ce qui les motivaient, c’était aussi l’argent gagné facilement. Quand le service militaire fût terminé, la guerre finie. Ils firent l’échange de bovins.  

Maître Henri regretta amèrement d’avoir échangé une très belle normande contre une vache d’Aubrac qui donnait si peu de lait. En plus, elle n’engraissait presque pas. Peut être sa chair serait excellente mais ce n’est pas pour autant qu’il aurait un meilleur prix au kilo à l’abattoir.

Cette vache, avec si peu de qualités, se nommait Hyménée. Elle avait une jolie robe couleur de pain bien cuit. Son regard était doux, cerclé d’un fin trait noir, lui dessinant les yeux en amandes. Hyménée suscitait la haine du troupeau. Les autres vaches lui donnaient des coups de queues, lui fouettaient la face. Elle recevait des coups de cornes, des coups de sabots. Comme chez les humains, elle n’était pas aimée parce qu’elle était différente. Seul le vieil Ovide s’intéressait sincèrement à elle. Lui qui n’avait jamais été tendre avec les autres vaches, il découvrait avec Hyménée ce que c’est que d’être prévenant et doux. La fureur du troupeau allait crescendo envers la petite vache d’Aubrac.

Peu de temps s’écoula quand le Maître Henri transféra le vieil Ovide dans une cours près de la route. Un jeune taureau fringuant, méchant, hautain et mesquin prit sa place. Tout le troupeau l’admirait. Quand Maître Henri lui amena Hyménée, elle lui déplut tellement qu’il la roua de coups. C’est in extremis que l’agriculteur la sortit de l’enclos. Il la mit avec Ovide. Sa décision était prise, elle partirait demain en même temps que le vieux taureau à l’abattoir. Toute la journée, Ovide s’occupa d’hyménée. En début de nuit, il lui expliquait dans sa grande sagesse qu’il avait compris que demain, ils seraient mis à mort tous les deux. Il voulait continuer de vivre à ses côtés. Aussi de sa puissance, il démolit la clôture C’est ensemble qu’ils s’enfuirent. Ils prirent la route de Muchedent, montèrent vers le Beau Soleil. A l’aube, ils avaient trouvé une belle clairière en forêt où ils regardèrent le soleil se lever.  Pour se reposer à l’abri, ils avaient trouvé un blockhaus, vestige de l’occupation allemande. Hyménée guérissait doucement de ses blessures et l’amour d’Ovide lui redonnait confiance en la race bovine.

Tout ce bonheur faillit basculer quand, Alphonse, un garde forestier les découvrit. Alphonse avait toujours voulu être éleveur comme son père. Mais il était le benjamin de la famille. Et il n’y avait pas assez de terre pour lui. Il se choisit un métier où il serait proche de la nature. C’est tout naturellement qu’il devint garde forestier. Pour garder Ovide et Hyménée, il se fit muter en Aveyron. Hyménée était folle de joie de retrouver sa terre de naissance. Là-bas, naquit plein de vaches et de taureaux, tous plus beaux les uns que les autres. Le premier des taureaux était tellement magnifique que Georges Lucien Guyot, un aveyronnais bien connu, en fit une statue de bronze. Vous pouvez toujours l’admirer place du Foirail à Laguiole. Quand à Ovide et Hyménée, ils vécurent encore très longtemps ensemble, admirant les levers et les couchers de soleil sur l’Aubrac.

 

 

 

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22 septembre 2006 5 22 /09 /septembre /2006 01:17

Hector le coq de Cressy

 

Hector avait pris la sale manie de se pavaner dans les rues de Cressy. Il regardait les gens de haut : il méprisait ces sots d’humains. Depuis que la fermière lui avait dit qu’il avait le plus beau plumage de tout le Pays de Bray, Hector était devenu vaniteux, insupportable. Les coqs ont bien de la chance d’avoir un si beau plumage alors que celui des poules est si terne, si fade.

Les poules passaient leur temps à l’admirer, à le suivre, à chacun de ses pas. Hector traversait Cressy, toute la journée, de long en large, avec sa cour de poules. Le Maire du village avait été obligé de mettre des pancartes spéciales, « passage de coq », afin de faire ralentir les voitures. Les automobilistes n’étaient pas tous conciliants. Certains peu patients auraient aimé lui voler dans les plumes, le voir finir en coq au vin.

La fermière, quand à elle, raffolait d’Hector. Elle en était si fière! Le dimanche, elle l’emmenait faire les concours de beauté pour les volatiles. Ce n’est pas ainsi que Hector apprit à devenir humble, bien au contraire. Il était imbu de lui-même, insupportable, il se vantait, il se pavanait.  

 

 

A force de le voir admirer son reflet dans chaque flaque d’eau, les poules se lassèrent. L’une après l’autre, elles le quittèrent pour le coq du voisin. Certes, il était boiteux, il était vieux, il louchait, mais il était si gentil, si respectueux des femmes. Et il avait une grande qualité qu’Hector n’avait pas : la modestie.

Jamais Hector ne fut en mesure de comprendre pourquoi ces stupides poules l’avaient laissé pour rejoindre ce va nu-pied. Pour lui, les femelles ne valaient pas la peine du moindre regard, elles n’auraient dû lui donner que de l’admiration, de la dévotion, le servir, lui apporter des vers de terre tout frais, encore vivants.

Dès ce moment là, Hector dépassa les bornes quand il jugea que tous devaient l’aduler, y compris les humains, de jour comme de nuit. Il poussait des cocoricos tonitruants pour tenir en éveil les habitants de Cressy. Il s’égosillait du matin jusqu’au soir et même durant la nuit. S’il n’avait pas eu son content d’hommages dans la journée, il menait à tous « une vie de patachon ».

Les cressissois étaient épuisés. Tous avaient les yeux cernés. Les femmes pleuraient. Les enfants ne se concentraient plus à l’école. Pire que tout : la fermière trouvait qu’Hector avait une si jolie voix, au timbre si léger mais puissant. Il est vrai que sa voix était puissante, cependant il n’avait aucun talent mélodique.

La fermière concéda aux habitants de Cressy qu’il avait besoin de quelques leçons de chant. Dès ce moment, un maître de chant le prit en charge pour lui apprendre les rudiments du solfège, ainsi qu’à faire des vocalises. Malgré tous les efforts du Maestro, Hector chantait faux, une vraie casserole. Malheureusement, il n’y avait que lui et sa maîtresse pour ne pas s’en rendre compte. C’est beau l’innocence !

Hector voulait que tout tourne, fonctionne selon son bon vouloir. A force de l’entendre « braire » tout le jour et la nuit, les nuages se fâchèrent. Ils prirent une couleur sombre, ils cachèrent le soleil. Le soleil était d’accord avec les nuages et c’est lui qui régla le problème. Il envoya sur Hector des éclairs. L’un d’eux foudroya Hector de plein fouet. Il tressauta et s’immobilisa. Ses couleurs chatoyantes avaient disparu pour une autre qui étincelait à la lumière du soleil. Les nuages s’étaient apaisés, et le soleil brillait de mille feux.

Hector avait été transformé en coq de cuivre. Le Maire décida de le mettre en haut du clocher de l’église, avec une girouette. Hector, qui durant sa vie, avait toujours fait ce qu’il voulait, devait se soumettre à la loi du vent. Mais sa petite cervelle fonctionnait toujours. Pendant un temps, il pesta contre la situation, et finalement,il jugea qu’il était bien là-haut. Il pensait qu’ainsi il dominait le monde, et que c’est lui qui faisait et la pluie et le beau temps. Jamais on ne pourrait rien retirer de bon d'Hector. Et pourtant le soleil et les nuages étaient disposés à lui rendre sa forme originelle à condition qu'il devienne humble.

 

Si un jour Hector n'est plus sur le clocher de l'église de Cressy, c'est qu'il aura enfin compris ce qu'est l'humilité et la modestie.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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22 septembre 2006 5 22 /09 /septembre /2006 01:15

Préface

 

 

 

L’idée des contes de la forêt d’Eawy est venue un dimanche d’avril 2006. J’étais en reportage, et en avance sur mon rendez-vous. J’attendais des randonneurs pour un reportage. Je repensais à une dame de Cressy qui a beaucoup de talent et fait tous les ans des fresques pour les fêtes de fin d’année, Pâques. Je me disais que ce serait formidable si elle faisait des illustrations de livres pour enfant. Ce premier conte est né ainsi. J’ai noirci quelques pages de blocs. Et c’est tout naturellement que Cressy a été choisi pour ce premier conte. Cette histoire est restée à l’état brut jusqu’à la naissance de magazine.

Dans le futur, je vous raconterais d’autres contes se déroulant aux alentours de la forêt d’Eawy. J’espère qu’ils apporteront des sourires sur les visages des petits et des grands, tout en vous faisant entrer dans mon monde imaginaire, avec en toile de fond les villages que vous connaissez et aimez autant que moi.

 

 

 

Bénédicte Mouchard

 

 

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